La revente du site nucléaire EZB (Eckert & Ziegler Bebig) pour un euro symbolique à la compagnie australienne TELIX alerte les mandataires Ecolo, à tous les échelons du pouvoir, d’autant plus qu’elle arrive en pleine crise du Covid-19.

Le site nucléaire EZB, situé à Seneffe et appartenant à la société pharmaceutique allemande EZAG (Eckert & Ziegler AG), pose problème depuis plus de 10 ans. Cette installation, qui possède 2 cyclotrons radioactifs, produisait jusqu’en 2008 des implants thérapeutiques à l’iode-125 pour le traitement de certains cancers, avant d’être abandonnée. Depuis 12 ans, le site et les déchets radioactifs qui s’y trouvent sont donc à l’abandon, ce qui représente de nombreux risques radiologiques et environnementaux.

Depuis 2016, malgré les injonctions répétées de l’AFCN (Agence Fédérale de Contrôle Nucléaire), allant jusqu’à des menaces de plaintes au pénal, l’usine n’a jamais été démantelée par sa société-mère, EZAG. En effet, il n’y a pas d’obligation contraignante pour le démantèlement d’installations nucléaires, ce qui permet aux exploitants nucléaires de continuer à privilégier leurs intérêts financiers à court terme.

En 2015, l’Ondraf (Organisme national des déchets radioactifs) estime le passif nucléaire du site seneffois (soit le coût de son démantèlement) à 10,145 millions €. Pourtant, après 12 années de procédure, EZAG vient de s’en débarrasser en la cédant à une firme pharmaceutique nucléaire australienne (Telix) pour 1€ symbolique. Ecolo a pu mettre la main sur un avis confidentiel de l’Ondraf qui mettait déjà l’AFCN en garde sur la capacité financière de Telix pour assumer le démantèlement de ce site. Mais malgré cet avis contraire, l’AFCN a autorisé ce transfert alors que Telix a estimé le coût du démantèlement à seulement 5,2 millions d’euros – soit deux fois moins que l’estimation faite par l’Ondraf, ce qui semble totalement insuffisant pour Ecolo-Groen.

Le député fédéral Ecolo, Samuel Cogolati, qui a enquêté sur ce dossier, déplore que l’AFCN ait pu approuver pareille revente d’un site nucléaire fantôme, qui plus est en pleine crise du Covid-19 : « L’AFCN sait que l’usine EZB à Seneffe est à l’abandon depuis 2008 et que son passif nucléaire dépasse les 10 millions €. En 2016, l’AFCN a même failli aller en justice contre EZAG pour les forcer à démanteler le site. Ecolo est intervenu à maintes reprises sur ce dossier à la Chambre, demandant davantage de sévérité à l’égard de la société. Et pourtant, aujourd’hui, l’AFCN approuve la revente de l’usine fantôme pour 1€, sans aucune garantie de démantèlement. C’est incompréhensible ! ».

Samuel Cogolati se demande également, ayant exploré les comptes annuels de Telix, si celle-ci pourra gérer un tel passif nucléaire. A la Région Wallonne, on s’inquiète du précédent que constitue la faillite organisée de Best Medical à Fleurus, en 2012, où des déchets radioactifs ont également été abandonnés. Le député régional Christophe Clersy rappelle qu’« à ce jour, le chantier de décontamination nucléaire de Best Medical comptabilise 14 ans de travaux (le chantier a débuté en 2012 et se prolongera jusqu’en 2026) pour une facture de 127,9 millions d’euros (selon les estimations de 2017), dont 118,9 millions d’euros à charge de la Région Wallonne ».

A Seneffe, l’échevin de l’environnement Manel Rico Grao demande que les autorités compétentes restent vigilantes et surveillera la suite du dossier. « A priori, la reprise d’un site tel que EZB est une bonne nouvelle pour les riverains, leur santé et leur environnement. Néanmoins, la crainte qu’on se retrouve dans quelques années avec une friche industrielle avec un certain niveau de radioactivité nous pousse à exiger que des mesures soient prises au niveau fédéral afin de pouvoir contraindre les propriétaires à dépolluer le site, dès l’arrêt des activités, par leurs propres moyens et d’éviter ainsi que ce soit la collectivité qui paie ».

Ecolo réclame ainsi l’introduction de mécanismes plus fermes permettant à l’État belge de contraindre un exploitant à démanteler ses installations nucléaires de manière rapide et à ses propres frais, selon le principe du pollueur-payeur. « Il est hors de question que le contribuable belge assume de nouveau les frais d’un cimetière radioactif. Plus que jamais, cette affaire démontre que la vigilance démocratique est de mise durant le confinement pour éviter des transactions à haut risque à la fois pour les finances publiques et l’environnement ! », conclut le député fédéral Ecolo, Samuel Cogolati.